Démence et troubles cognitifs : la vue, un facteur de risque identifié.

Selon les derniers chiffres de l’Organisation Mondiale de la Santé, la démence touche 57 millions de personnes dans le monde, avec 10 millions de nouveaux cas chaque année. Ce chiffre pourrait atteindre 152 millions d’ici 2050 selon certaines prévisions. Septième cause de décès chez les personnes âgées, la démence fait partie des maladies pour lesquelles les traitements restent limités, en raison de la complexité du cerveau.

Parmi une douzaine de facteurs à risque comme l’hypertension, le tabac ou la sédentarité, des chercheurs se sont penchés sur la santé visuelle. En effet, les yeux sont une véritable extension du cerveau, et la rétine fait partie du système nerveux central. Plusieurs études ont montré que des troubles visuels, lorsqu’ils ne sont pas corrigés, peuvent augmenter le risque de déclin cognitif et de démence. La dernière étude publiée en juillet 2024 dans The Lancet confirme la perte de vision comme un facteur de risque pour la démence.

Personne âgée atteinte de démence ou de troubles cognitifs

Quelles différences entre troubles cognitifs et démence ?

Il est fréquent de confondre troubles cognitifs et démence, alors que ces termes ne désignent pas exactement la même réalité.

  • Les troubles cognitifs légers (MCI) affectent la mémoire, le langage, la réflexion ou la prise de décision, mais n’altèrent pas le quotidien de manière significative. Ils peuvent être liés au vieillissement, à certaines maladies chroniques, à des traumatismes crâniens ou à la prise de certains médicaments.
  • La démence, quant à elle, est un syndrome caractérisé par un déclin progressif des fonctions cognitives et de la motricité, qui impacte fortement la vie quotidienne. La forme la plus fréquente est la maladie d’Alzheimer, représentant 60 à 70 % des cas. Bien que souvent irréversible, certaines interventions peuvent ralentir son évolution et améliorer la qualité de vie.

La maladie d’Alzheimer, forme la plus fréquente de démence.

Forme la plus fréquente de démence, la maladie d’Alzheimer se caractérise par une perte progressive de mémoire et des fonctions cognitives, pouvant aller jusqu’à des difficultés à parler ou à se déplacer. Ses causes combinent facteurs génétiques et environnementaux : âge, traumatismes crâniens, hypertension, diabète, tabagisme… 

Le cerveau subit un rétrécissement anormal au fil du temps.

Origine et découverte
La maladie porte le nom du médecin allemand Dr Aloïs Alzheimer, qui l’a décrite pour la première fois en 1901.

  • Le premier cas documenté concernait une patiente présentant une forme de démence sévère sénile,
  • En 1906, après son décès, l’autopsie de son cerveau a révélé des dépôts anormaux entre et à l’intérieur des cellules nerveuses.
  • En 1910, la maladie fut officiellement nommée « maladie d’Alzheimer ».

Points essentiels à retenir sur la maladie d’Alzheimer

  • Alzheimer est la première cause de handicap et de dépendance chez les personnes âgées dans le monde.
  • Il n’existe pas de traitement curatif, mais certains médicaments peuvent ralentir l’évolution des symptômes.
  • La maladie touche davantage les femmes (environ 60 % des cas).
  • En France, environ 30 000 personnes de moins de 60 ans vivent avec cette maladie.

Signes évocateurs de la maladie d’Alzheimer
La Fondation Alzheimer décrit 10 symptômes principaux, que l’on peut regrouper en 6 catégories :

  • Troubles de la mémoire : oublis répétés, surtout pour les événements récents.
  • Difficultés dans les gestes et le langage : maladresse dans les actes du quotidien et problèmes pour s’exprimer.
  • Altération des fonctions cognitives : difficultés de jugement, perte des capacités d’organisation et de raisonnement.
  • Désorientation : difficultés à se repérer dans le temps et l’espace.
  • Troubles de la reconnaissance : difficulté à identifier des objets ou des personnes familières.
  • Changements de comportement et de personnalité : irritabilité, anxiété, retrait social ou modifications psychologiques.

Si vous ou un proche présentez plusieurs de ces signes, il est important de consulter un médecin traitant. Celui-ci pourra évaluer la situation, écarter d’autres causes possibles et, si nécessaire, orienter vers des examens spécifiques.

Les différents types de démence

La démence peut avoir plusieurs causes : suites d’accidents vasculaires cérébraux (AVC), infections comme le VIH, consommation excessive d’alcool, lésions cérébrales répétitives ou carences nutritionnelles. On peut cependant distinguer différents types de démence.

Démence vasculaire

Elle résulte de dommages aux vaisseaux sanguins du cerveau, souvent liés à des AVC, des infarctus lacunaires ou une maladie des petits vaisseaux.

Démence à corps de Lewy

Proche d’Alzheimer et de Parkinson, elle provoque une perte progressive des facultés cognitives. Ce type de démence se caractérise par des dépôts anormaux de protéines dans les cellules nerveuses.

Démence fronto-temporale

Apparaissant généralement vers 60 ans, elle touche les lobes frontal et temporal, responsables du comportement, du langage et de la mémoire. Les patients présentent des changements de personnalité et troubles du langage.

Maladie de Parkinson

Il s’agit d’une maladie neurodégénérative qui provoque des tremblements, une rigidité musculaire et des problèmes d’équilibre. Au fur et à mesure que la maladie progresse, d’autres symptômes peuvent apparaître : difficulté à avaler, problèmes de paroles ou troubles du sommeil. 20 à 30% des patients développent une démence au cours de la maladie.

Maladie de Huntington

C’est une maladie génétique héréditaire qui entraîne des mouvements incontrôlés, des changements de personnalité et une détérioration cognitive. Contrairement aux autres types de démences, la maladie de Huntington peut survenir très tôt : les premiers symptômes commencent généralement entre 30 et 50 ans.

Démence de Korsakoff

Caractérisée par une atteinte de la mémoire à court terme, elle résulte d’une carence en vitamine B1, souvent liée à un alcoolisme chronique ou à des troubles alimentaires.

Démence mixte

Lorsque deux formes de démence coexistent, la plus fréquente est Alzheimer + démence vasculaire.

Préserver sa santé cognitive

La santé cognitive est à prendre au sérieux, et est le fruit de multiples facteurs. Agir sur certains facteurs permettrait de réduire les risques de développer les troubles cognitifs ou la démence. Il existe quelques gestes et conseils à adopter pour maintenir son cerveau en bonne santé à mesure que vous vieillissez :

  • faites au moins 30 minutes d’activité physique par jour afin de stimuler la circulation sanguine, l’oxygénation du cerveau et de prévenir certaines pathologies oculaires
  • mangez sainement et dormez au moins 7 à 8 heures par nuit : c’est bon à la fois pour votre santé cardio-vasculaire et pour vos yeux.
  • évitez le stress ou les autres facteurs de risque (tabagisme, alcoolisme et obésité)
  • consultez un médecin ophtalmologiste régulièrement et portez une correction (lunettes ou lentilles de contact) adaptée à votre vue
  • pour vos yeux, limitez votre exposition à la lumière bleue des écrans et exposez-vous régulièrement à la lumière naturelle (en vous protégeant des rayons UV à l’aide d’une paire de lunettes de soleil)
  • si vous avez des doutes quant à l’apparition de signes évocateurs de troubles cognitifs, consultez un neurologue tous les 6 à 9 mois.

Vision et troubles cognitifs : Quels liens ?

Les liens entre troubles visuels et déclin cognitif sont aujourd’hui bien documentés par la recherche médicale. Longtemps considérés comme deux problèmes distincts liés au vieillissement, la vue et la mémoire apparaissent en réalité étroitement connectées.

Tout d’abord, une étude publiée en 2010 menée auprès de 685 personnes de plus de 85 ans par Rogers et Langa ont observé que les patients avec une mauvaise vue ont cinq fois plus de risques de développer des troubles cognitifs et neuf fois plus de risques d’être concernés par la maladie d’Alzheimer. Ces données suggèrent que la correction et la prise en charge précoce des troubles visuels pourraient jouer un rôle de prévention du déclin cognitif.

D’autres recherches confirment ces observations.

Ainsi, une étude, publiée en 2021 dans le British Journal of Ophtalmology, du département d’ophtalmologie de la Guangdong Academy of Medical Sciences a montré que certaines pathologies oculaires augmentent significativement le risque de démence :

  • la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) accroît le risque de développer Alzheimer de 26 %,
  • la cataracte est associée à une augmentation de 11 %,
  • la combinaison DMLA + diabète augmente le risque de 61 %.

Par ailleurs, la perte de sensibilité aux contrastes apparaît comme le trouble visuel le plus souvent associé à la démence, touchant environ 15 % des cas, devant les difficultés à voir de près (près de 10 %) et la myopie (environ 5 %). Enfin, la cataracte, qui peut être corrigée par chirurgie, pourrait contribuer à réduire le risque de démence d’environ 30 % (Sciences & Vie).

Ces résultats rejoignent ceux de bons nombres d’autres études internationales : les déficiences visuelles, mêmes légères peuvent fragiliser les fonctions cognitives en :

  • réduisant la stimulation du cerveau,
  • favorisant l’isolement social,
  • augmentant le risque de dépression, un facteur aggravant de démence.

L’étude récente publiée en juillet 2021 précise que la perte de vision entraînerait une baisse de la participation aux activités stimulantes, sociales ou cognitives. Cet isolement accélère le déclin cognitif. Elle confirme également que l’augmentation des risques de démence est notamment associée aux maladies tels que la cataracte, la rétinopathie diabétique mais pas le glaucome.

La rétine, pouvant prévenir la démence

La recherche avance aussi sur le rôle de la rétine comme « fenêtre du cerveau ». Selon National Geographic, certaines anomalies de la rétine observées par imagerie sont associées aux troubles cognitifs légers et pourraient devenir un outil de dépistage précoce de la démence.

Ces anomalies rétiniennes ne sont pas spécifiques : certaines sont observées dans Alzheimer, d’autres dans Parkinson, mais elles touchent des couches différentes de la rétine. Des outils comme l’eye tracking, déjà utilisés par des opticiens et neurologues, permettent d’analyser la vitesse des mouvements oculaires, ce qui pourrait aider à l’avenir, à identifier plus tôt certaines atteintes neurodégénératives.

Les troubles de la vue liés à la démence

Manifestations courantes

Plusieurs études montrent que la dégradation de la vision augmente le risque de troubles cognitifs. Une étude coréenne chez des personnes de plus de 65 ans avec baisse de l’acuité visuelle a révélé un risque de démence augmenté de 50 %. Des anomalies rétiniennes observées via imagerie peuvent aussi être un indicateur précoce de troubles cognitifs légers, que ce soit dans Alzheimer ou Parkinson.

Différents symptômes visuels peuvent apparaître chez les personnes atteintes de démence :

  • Difficulté à reconnaître des visages ou des objets familiers,
  • Incapacité à évaluer les distances ou la profondeur,
  • Hallucinations visuelles,
  • Difficultés à suivre des objets avec les yeux,
  • Vision périphérique réduite.

Solutions et aides visuelles

Concernant les aides visuelles, tout dépendra de l’ordonnance établie par l’ophtalmologiste. L’opticien pourra proposer des lunettes adaptées, ainsi que des accessoires correspondant aux besoins des personnes souffrantes.

  • Lunettes adaptées (verres progressifs, filtres anti-reflets)
  • Loupes ou aides grossissantes pour lecture
  • Éclairage renforcé et contraste visuel dans la maison

Impacts sur la vie quotidienne des personnes atteintes

Stratégies pour améliorer la qualité de vie

Vivre avec un trouble cognitif ou une démence associée à un trouble visuel peut rendre les tâches quotidiennes difficiles et augmenter les risques d’accidents. Adapter l’environnement et fournir un accompagnement adéquat est essentiel pour préserver l’autonomie et la sécurité.

Pour aider un proche ou un résident, il est important de veiller à aménager correctement le domicile et à fournir un soutien adapté :

Sécuriser l’environnement :

  • Retirer les tapis glissants et obstacles pouvant provoquer des chutes
  • Installer des rampes et barres d’appui dans les escaliers et la salle de bain
  • Sécuriser les portes et fenêtres pour limiter l’errance et prévenir les accidents

Optimiser la visibilité et les repères :

  • Utiliser des couleurs contrastées et vives pour distinguer les surfaces (bords de lits, marches, poignées de portes)
  • Installer un éclairage suffisant, notamment la nuit et dans les couloirs
  • Étiqueter les objets et pièces pour faciliter l’orientation

Réduire les risques liés à la manipulation d’objets :

  • Retirer ou sécuriser les objets dangereux dans la cuisine ou les zones à risque
  • Ranger les produits ménagers et médicaments en les rangeant hors de portée

Stimuler les capacités cognitives et sensorielles :

  • Maintenir des activités : lecture, jeux de mémoire, musique, promenades etc.
  • Favoriser l’interaction sociale et le maintien d’une routine quotidienne

Pour plus de recommandations pratiques, la Fondation Alzheimer propose un guide complet sur l’adaptation du domicile : Guide Alzheimer – Adapter le domicile

Le rôle des aidants et des professionnels

Le soutien des aidants familiaux et des professionnels de santé est crucial pour préserver au maximum l’autonomie, la sécurité et la qualité de vie des personnes atteintes :

  • Formation des aidants : comprendre les symptômes cognitifs et visuels, savoir gérer les comportements complexes.
  • Suivi médical régulier : consultations neurologiques, dépistage des troubles cognitifs (tous les 6 à 9 mois pour évaluer l’évolution).
  • Adaptation de l’environnement : maisons, résidences et lieux publics adaptés pour réduire les risques de chute et de confusion.
  • Accompagnement social et émotionnel : activités stimulantes, maintien des interactions sociales, soutien psychologique pour la personne et sa famille.
  • Coordination des soins : infirmiers, ergothérapeutes, opticiens, orthophonistes et associations spécialisées (Fondation Alzheimer, Alenvi, OMS)

Ces actions combinées permettent de ralentir le déclin fonctionnel, de préserver l’autonomie et d’améliorer la qualité de vie des personnes concernées. 

Questions fréquentes sur le service Les Opticiens Mobiles

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